Conduite pratique devant la découverte d’un épanchement du genou
Avant de demander une imagerie sophistiquée, l’examen clinique et la ponction articulaire pour analyse du liquide prélevé demeurent les deux temps fondamentaux d’orientation du diagnostic face à la découverte d’un épanchement du genou.
Circonstances de survenue
L’épanchement peut être d’installation progressive, le patient constatant l’apparition au décours d’un effort d’une sensation de gonflement du genou. Ailleurs, il peut apparaître brutalement, ce gonflement survenant à la suite d’un choc ou d’un accident sportif.
Examen clinique
Lors de l’examen clinique, on constate un gonflement sus-rotulien (figure 1) à opposer à un gonflement sous-rotulien qui se rencontre souvent au cours de certains syndromes rotuliens. Le choc rotulien est recherché sur un patient couché, voire debout. Les mensurations du périmètre du genou au bord supérieur de la rotule permet d’objectiver le gonflement. Le reste de l’examen vise à préciser :
Figure 1. Gonflement sus-rotulien du genou droit.
les points ou les zones douloureuses ;
– une éventuelle laxité antéropostérieure ou rotatoire ;
– la présence ou non de signes méniscaux ;
– les signes rotuliens ;
– et l’état des tendons.
Ponction articulaire
Au terme de l’examen, une idée clinique se dégage. Le deuxième temps consiste à examiner le liquide articulaire prélevé par ponction.
Technique
La réalisation de ce prélèvement nécessite une asepsie rigoureuse avec nettoyage de la peau en ayant recours à une solution alcoolique avant d’utiliser un produit iodé : alcool iodé ou povidone iodée. Il existe deux voies d’abord : l’externe, qui est la plus fréquemment utilisée, et l’interne, à laquelle les radiologues ont le plus souvent recours (figure 2). Le liquide est de préférence recueilli sur tube hépariné, 1 goutte par ml de liquide, ou dans un flacon à bille. Nous n’étudierons pas dans cette fiche pratique le cas d’un épanchement sanglant, qui nous fait sortir du sujet.
Examen du liquide
• L’ aspect macrocospique est important. Un liquide clair et citrin oriente vers une pathologie mécanique ; un liquide trouble traduit une pathologie micro-cristalline, voire infectieuse, en fonction du contexte. S’il est séro-hématique, il témoigne, en l’absence de mécanisme traumatique, d’une pathologie synoviale. La viscosité est maximale dans les liquides mécaniques, diminuée dans les liquides inflammatoires.
Figure 2.
Technique de ponction du genou :voie d’abord externe (a) et interne (b).
• Le test à l’eau oxygénée est de réalisation simple : il suffit de mettre en contact une goutte de liquide et une goutte d’eau oxygénée. La présence de peroxydases dans les liquides inflammatoires libère l’oxygène et provoque immédiatement la libération de bulles.
• Les autres analyses du liquide. Ce premier stade de l’examen du liquide doit être complété par les analyses chimique et cellulaire, cristalline, voire bactériologique. On oppose classiquement 4 types de liquide (tableau) :
– liquide mécanique ;
– liquide mixte ;
– liquide inflammatoire ;
– liquide infectieux. La présence du liquide élimine a priori toute la pathologie extraarticulaire.
Quelle étiologie évoquer ?
La présence d’un liquide mécanique permet d’évoquer, en cas de début progressif, une lésion chondrale ou d’arthrose, une lésion méniscale isolée ou au cours d’une laxité chronique connue ancienne, la présence d’un corps étranger ou encore d’une instabilité rotulienne. Dans un contexte traumatique, on s’orientera plus vers une lésion méniscale, chondrale, un accident de luxation de rotule, voire une lésion du pivot central. Lorsque l’épanchement rétrocède rapidement à la ponction simple ou à la ponction plus infiltration, la présence de liquide peut correspondre à :
– une fracture ou fissure chondrale a minima ;
– une mini-hémarthrose avec épanchement réactionnel ;
– une libération de toxines ou enzymes synoviaux irritante dans les suites d’un traumatisme par ecchymose de la synoviale ;
- ou une étiologie inconnue.
Faut-il poursuivre les investigations ?
Il faut au moins demander une radiographie simple. Ensuite, d’autres investigations peuvent être requises si on se trouve devant un sportif de haut niveau ou un amateur régulier. Dans ce cas, il faut être investigatif. Dans le sport de loisir pur, voire occasionnel, on peut se donner un délai de grâce de quelques jours ou une semaine, mais en cas de rechute ou en l’absence d’efficacité du traitement symptomatique, d’autres explorations doivent être entreprises. Il faut savoir choisir l’examen paraclinique en fonction du contexte et en plus des radiographies standards. On aura recours, selon le contexte, à une échographie, un arthro-scanner ou une IRM. L’arthroscopie n’a quasiment pas de place dans la phase diagnostique. En revanche, elle est un geste thérapeutique dans la majorité des cas.
• Il faut éliminer les genoux pseudo-mécaniques avec des liquides mécaniques qui peuvent faire découvrir une pathologie synoviale comme une chondromatose.
• La découverte d’un liquide mixte dans une ambiance sportive ou microtraumatique ne doit pas faire éliminer une maladie synoviale inflammatoire, à type de spondylarthropathie par exemple.
• Les liquides inflammatoires dans les mono-arthrites se retrouvent dans le cadre d’un rhumatisme inflammatoire débutant.
• La présence de micro-cristaux oriente le plus souvent vers une chondrocalcinose, plus que vers une goutte métabolique. Quant à la pathologie infectieuse, si elle demeure exceptionnelle, elle doit rester présente à notre esprit surtout en cas d’effraction articulaire dans les jours ayant précédé la découverte de l’épanchement.
Conclusion
La ponction et l’analyse du liquide restent indispensables à la suite de la découverte d’un épanchement du genou.
J.-P. BONVARLET Institut Appareil Locomoteur Nollet, Paris
Avant de demander une imagerie sophistiquée, l’examen clinique et la ponction articulaire pour analyse du liquide prélevé demeurent les deux temps fondamentaux d’orientation du diagnostic face à la découverte d’un épanchement du genou.
Circonstances de survenue
L’épanchement peut être d’installation progressive, le patient constatant l’apparition au décours d’un effort d’une sensation de gonflement du genou. Ailleurs, il peut apparaître brutalement, ce gonflement survenant à la suite d’un choc ou d’un accident sportif.
Examen clinique
Lors de l’examen clinique, on constate un gonflement sus-rotulien (figure 1) à opposer à un gonflement sous-rotulien qui se rencontre souvent au cours de certains syndromes rotuliens. Le choc rotulien est recherché sur un patient couché, voire debout. Les mensurations du périmètre du genou au bord supérieur de la rotule permet d’objectiver le gonflement. Le reste de l’examen vise à préciser :
Figure 1. Gonflement sus-rotulien du genou droit.
les points ou les zones douloureuses ;
– une éventuelle laxité antéropostérieure ou rotatoire ;
– la présence ou non de signes méniscaux ;
– les signes rotuliens ;
– et l’état des tendons.
Ponction articulaire
Au terme de l’examen, une idée clinique se dégage. Le deuxième temps consiste à examiner le liquide articulaire prélevé par ponction.
Technique
La réalisation de ce prélèvement nécessite une asepsie rigoureuse avec nettoyage de la peau en ayant recours à une solution alcoolique avant d’utiliser un produit iodé : alcool iodé ou povidone iodée. Il existe deux voies d’abord : l’externe, qui est la plus fréquemment utilisée, et l’interne, à laquelle les radiologues ont le plus souvent recours (figure 2). Le liquide est de préférence recueilli sur tube hépariné, 1 goutte par ml de liquide, ou dans un flacon à bille. Nous n’étudierons pas dans cette fiche pratique le cas d’un épanchement sanglant, qui nous fait sortir du sujet.
Examen du liquide
• L’ aspect macrocospique est important. Un liquide clair et citrin oriente vers une pathologie mécanique ; un liquide trouble traduit une pathologie micro-cristalline, voire infectieuse, en fonction du contexte. S’il est séro-hématique, il témoigne, en l’absence de mécanisme traumatique, d’une pathologie synoviale. La viscosité est maximale dans les liquides mécaniques, diminuée dans les liquides inflammatoires.
Figure 2.
Technique de ponction du genou :voie d’abord externe (a) et interne (b).
• Le test à l’eau oxygénée est de réalisation simple : il suffit de mettre en contact une goutte de liquide et une goutte d’eau oxygénée. La présence de peroxydases dans les liquides inflammatoires libère l’oxygène et provoque immédiatement la libération de bulles.
• Les autres analyses du liquide. Ce premier stade de l’examen du liquide doit être complété par les analyses chimique et cellulaire, cristalline, voire bactériologique. On oppose classiquement 4 types de liquide (tableau) :
– liquide mécanique ;
– liquide mixte ;
– liquide inflammatoire ;
– liquide infectieux. La présence du liquide élimine a priori toute la pathologie extraarticulaire.
Quelle étiologie évoquer ?
La présence d’un liquide mécanique permet d’évoquer, en cas de début progressif, une lésion chondrale ou d’arthrose, une lésion méniscale isolée ou au cours d’une laxité chronique connue ancienne, la présence d’un corps étranger ou encore d’une instabilité rotulienne. Dans un contexte traumatique, on s’orientera plus vers une lésion méniscale, chondrale, un accident de luxation de rotule, voire une lésion du pivot central. Lorsque l’épanchement rétrocède rapidement à la ponction simple ou à la ponction plus infiltration, la présence de liquide peut correspondre à :
– une fracture ou fissure chondrale a minima ;
– une mini-hémarthrose avec épanchement réactionnel ;
– une libération de toxines ou enzymes synoviaux irritante dans les suites d’un traumatisme par ecchymose de la synoviale ;
- ou une étiologie inconnue.
Faut-il poursuivre les investigations ?
Il faut au moins demander une radiographie simple. Ensuite, d’autres investigations peuvent être requises si on se trouve devant un sportif de haut niveau ou un amateur régulier. Dans ce cas, il faut être investigatif. Dans le sport de loisir pur, voire occasionnel, on peut se donner un délai de grâce de quelques jours ou une semaine, mais en cas de rechute ou en l’absence d’efficacité du traitement symptomatique, d’autres explorations doivent être entreprises. Il faut savoir choisir l’examen paraclinique en fonction du contexte et en plus des radiographies standards. On aura recours, selon le contexte, à une échographie, un arthro-scanner ou une IRM. L’arthroscopie n’a quasiment pas de place dans la phase diagnostique. En revanche, elle est un geste thérapeutique dans la majorité des cas.
• Il faut éliminer les genoux pseudo-mécaniques avec des liquides mécaniques qui peuvent faire découvrir une pathologie synoviale comme une chondromatose.
• La découverte d’un liquide mixte dans une ambiance sportive ou microtraumatique ne doit pas faire éliminer une maladie synoviale inflammatoire, à type de spondylarthropathie par exemple.
• Les liquides inflammatoires dans les mono-arthrites se retrouvent dans le cadre d’un rhumatisme inflammatoire débutant.
• La présence de micro-cristaux oriente le plus souvent vers une chondrocalcinose, plus que vers une goutte métabolique. Quant à la pathologie infectieuse, si elle demeure exceptionnelle, elle doit rester présente à notre esprit surtout en cas d’effraction articulaire dans les jours ayant précédé la découverte de l’épanchement.
Conclusion
La ponction et l’analyse du liquide restent indispensables à la suite de la découverte d’un épanchement du genou.
J.-P. BONVARLET Institut Appareil Locomoteur Nollet, Paris