Entre une atteinte fréquente et une maladie à multiples facettes au carrefour de l’auto-immunité
Le syndrome sec (SS), défini par une sécheresse des muqueuses, principalement buccales et oculaires, est un motif de plaintes fréquent et pourtant trop souvent ignoré ou négligé alors qu’il concerne notamment un quart des personnes de plus de 60 ans en France comme au Maroc. Parmi ses origines, figure une de ses maladies les plus emblématiques, le Gougerot–Sjögren (SGS), véritable "syndrome carrefour" au sein des maladies auto-immunes. Celui-ci touche entre 0,1 et 0,3 % de la population, principalement des femmes et autour de la cinquantaine (soit autour certainement de cinquante mille femmes au Maroc). Son diagnostic est parfois délicat alors même que les tests utilisés pour la confirmation d’abord du SS et ensuite du SGS souffrent encore parfois d’un manque de standardisation.
SOMMAIRE
Le syndrome sec : des manifestations diverses et des causes variées
Le syndrome de Gougerot - Sjögren (SGS): une pathologie primaire ou secondaireLe diagnostic délicat et les risques potentiellement graves du Gougerot - Sjögren
Les solutions thérapeutiques du Syndrome Sec et du SGS : des acquis mais encore beaucoup à espérer
ANNEXES
Les glandes salivaires
Les glandes lacrymales
Prudence devant les écrans
La cytokine BAFF un acteur clé du SGS
L’épigénétique : une nouvelle approche pour cerner la pathogénie auto-immune
Abstract
Références bibliographiques
Articles médicaux de l’Auteur sur les maladies auto-immunes
1/ Le syndrome sec : des manifestations diverses et des causes variées
Au-delà de ses signes les plus habituels, la sécheresse oculo-salivaire, les autres manifestations fonctionnelles du SS, très diverses, dépendent des muqueuses atteintes : toux sèche persistante avec hyperactivité bronchique (1), irritation nasale et rhinite crouteuse, prurit vulvo-vaginal et dyspareunie, érythème et prurit avec une peau sèche (2).
1.1/ La sécheresse buccale ou xérostomie
Elle se traduit par une sensation de bouche sèche, une soif accrue avec polyurie, des difficultés à la mastication, une ingestion répétée de liquides lors des repas, des problèmes dentaires ou des douleurs de la bouche, ainsi qu’une fissuration de la bouche ou des lèvres, avec un aspect dépapillé de la langue et vernissé de la bouche (3,4). Dans les cas extrêmes, les aliments adhèrent à la langue, nécessitant la prise d’eau pour les décoller, ou la langue en se collant au palais entrave l’élocution (5).
L’approche quantitative et qualitative de la composante salivaire du SS est parfois problématique : ainsi, dans les stades précoces du syndrome de Gougerot–Sjögren (SGS), la quantité de salive est conservée mais sa qualité modifiée, ce qui donne toutefois une sensation de sécheresse difficile à objectiver. Les moyens utilisés à cet effet ont leurs limites : l’interprétation de la scintigraphie salivaire, d’utilisation non courante, est sujette à certaines incertitudes (6) ; la sialographie parotidienne (7) n’est contributive que dans les formes très évoluées ; la mesure du débit salivaire est difficile et n’est usitée que dans quelques centres en Europe ; l’échographie et l’IRM salivaires démontrent maintenant leurs performances en comparaison avec les autres procédés. Leur caractère non invasif et indolore est de plus séduisant, de même que leur pouvoir d’évaluer la fonction glandulaire (.
1.2/ La sécheresse oculaire ou xérophtalmie
On peut mesurer son ampleur (9), quand on sait qu’elle concerne 15 à 20 % des plus de 70 ans et représente jusqu’à 30 % de motifs de consultation en ophtalmologie.
Ses manifestations (10), liées à une altération quantitative ou qualitative des larmes, sont très variables (11) : sensation de corps étranger, de brûlures, rougeur oculaire, sensibilité à la lumière vive, trouble visuel intermittent ou même larmoiement excessif paradoxal. Outre une influence nuisible de l'air climatisé, du vent ou d’une atmosphère sèche, ces signes vont s’accentuer au cours de la journée et durant la lecture : ainsi, dans le travail prolongé devant un écran d'ordinateur, la cadence du clignement tombe à 3 à 4 fois par minute contre 15 en moyenne normalement, ce qui fragilise davantage la qualité du film lacrymal de la personne atteinte. Dans certains cas, on constate une difficulté à mouvoir les paupières ou à ouvrir spontanément les yeux le matin au réveil. Ce déficit en larmes expose même à la survenue d’une kérato- conjonctivite lésant la cornée ou pire de la complication cornéenne la plus sévère, des ulcères cornéens susceptibles de se perforer (12).
L’exploration repose essentiellement sur le test de Schirmer, la référence jusqu’à présent (10). Une bandelette de papier de 5 mm de large et 35 mm de long, millimétrée, est placée dans le cul-de sac conjonctival inférieur de chaque œil près de l’angle externe . La longueur du papier humidifié par les larmes est relevée après cinq minutes. En cas de sécheresse oculaire importante, le patient ressent une sensation de brûlure pendant l’examen. Le test est dit positif si les larmes imbibent moins de 5 mm/5minutes de la bandelette, la sensibilité et la spécificité variant entre 76-82 % et 68-90 % respectivement selon la méthode utilisée. L’instillation de colorants (fluorescéine et Vert de Lissamine) est utile pour apprécier le retentissement cornéen du syndrome sec et la stabilité du film lacrymal (par la méthode du Break- up time BUT).
1.3/ Les causes multiples du Syndrome Sec
On citera d’abord par ordre d’importance l’atrophie des glandes du fait de l’âge puis les médicaments : plus de 400 spécialités pharmaceutiques sont concernées dont l’atropine, la morphine, les antihistaminiques, certains antidépresseurs et neuroleptiques, les antiparkinsoniens, les diurétiques, les alpha et bétabloquants, les inhibiteurs calciques, la toxine botulinique de type A... Une modification ou un rééquilibrage du traitement du traitement suffit souvent pour réduire de façon supportable ou résoudre cette gêne. Le SS trouve ensuite son origine dans le tabac, la carence oestrogénique post ménopausique, un diabète décompensé, les états de stress ou de dépression ou encore dans des situations attendues telles la radiothérapie cervico-faciale et la réaction du greffon contre l’hôte. Ailleurs, il sera témoin de la sarcoïdose (13), de l’amylose, de l’infection par les virus de l’hépatite C ou du SIDA… ou il révélera encore l’hémochromatose et le scorbut.
Enfin, le SS se situera au cœur du Syndrome de Gougerot–Sjögren SGS, de façon tellement emblématique d’ailleurs qu’on fait souvent improprement l’amalgame entre les deux.
2/ Les manifestations du syndrome de Gougerot - Sjögren (SGS): une pathologie primaire ou secondaire
Le SGS est une maladie auto-immune, individualisée (14) il y a une soixantaine d’années, définie d’abord comme une exocrinopathie (15) et actuellement comme une épithélite (16), les cellules épithéliales salivaires jouant probablement un rôle prééminent. Il est considéré comme une des principales maladies systémiques auto-immunes après notamment la polyarthrite rhumatoïde en fréquence, La prévalence du SGS varie considérablement, de 0,1 à 1 % selon la population examinée, les méthodes diagnostiques et les critères de classification utilisés. Il est considéré comme une MALADIE RARE dans certains pays. Il concerne neuf fois sur dix le sexe féminin, soit entre trente et cent mille femmes au Maroc par exemple. Il est néanmoins peu connu du grand public et même parfois des professionnels de santé, d’où un retard de diagnostic estimée à au moins 8 années (17).
Le SS en constitue la principale spécificité, dû notamment à l’infiltration des glandes lacrymales et salivaires par des cellules inflammatoires. L’hypertrophie récidivante très fréquente des glandes parotidiennes (observée dans 50% des cas), et dans une moindre mesure des glandes sous maxillaires et lacrymales, est le repère direct du processus. La maladie se manifestera également par :
- une asthénie,
- des douleurs articulaires ou musculaires,
voire :
- une polyarthrite,
un phénomène de Raynaud dans 20% des cas (18), ce qui correspond à un trouble de la microcirculation des extrémités, notamment des mains,
- et des manifestations pulmonaires sous la forme couramment d’une trachéo-bronchite sèche (19, 20, 21).
Son mode de révélation est variable d’une personne à l’autre, et parfois ce sont les manifestations extra-glandulaires qui amènent au diagnostic : il sera ainsi posé devant
- un purpura vasculaire (10 à 30% des cas),
- une neuropathie périphérique (8 à 30% des cas) de présentation très protéiforme (22, 23) avec notamment des atteintes du nerf trijumeau) ou centrale (˂5% des cas)
- et, de façon plus controversée, des polyadénopathies (24, 25) de petite taille,
- une splénomégalie (19% des cas),
- ou encore des signes respiratoires attachés à une pneumopathie interstitielle ou une fibrose pulmonaire.
Le SGS a cette particularité unique dans les maladies auto-immunes d’être soit isolé, primaire, soit associé à une autre maladie auto-immune spécifique d’organe ou systémique et donc secondaire à des pathologies (26) tels que polyarthrite rhumatoïde dans 30 % des cas, lupus érythémateux disséminé, connectivite mixte, dermatomyosite, cirrhose biliaire primitive, hépatite chronique active, thyropathies auto-immunes, anémie de Biermer, anémie hémolytique auto-immune, purpura thrombopénique auto-immun… Le syndrome sec observé au cours de la sclérodermie peut ne pas être dû au SGS mais à la fibrose généralisée de la maladie. À souligner que les SS associés au SGS primitif sont plus sévères que les formes liées au SGS secondaire.
3/ Le diagnostic délicat du Gougerot - Sjögren
Le syndrome sec n’est évidemment pas exclusif au SGS et il est difficile parfois de confirmer objectivement la sécheresse lacrymale ou buccale, ce qui rend aléatoire le diagnostic du SGS dans l’éventualité de l’absence de stigmates biologiques ou de preuves histologiques. Le diagnostic n’est d’ailleurs pas facile à poser en raison de la variabilité de la présentation clinique et de la progression insidieuse de la maladie. Il est donc nécessaire d’être précautionneux dans la démarche, sauf sinon à porter par excès ou par défaut ce diagnostic. Celui-ci repose sur des éléments cliniques, biologiques, histologiques et radiologiques, après exclusion d’autres causes. Des critères consensuels ont été établis à l’échelon international en 2002 pour aider à cette détermination (cf. tableau 1) (27). Une révision de ces critères a été proposée au printemps 2012 (cf. tableau 2) par un groupe de travail international (28).La comparaison entre les deux méthodes montre en pratique quotidienne qu’aucune classification n’est vraiment supérieure à l’autre dans l’établissement de la pathologie.Tableau 1
Critères du syndrome de Gougerot-Sjögren du groupe
de consensus américano-européen (2002)
I – Symptômes oculaires |
Au moins un des trois critères suivants : |
– sensation quotidienne, persistante et gênante d’yeux secs depuis plus de 3 mois |
– sensation fréquente de « sable dans les yeux » |
– utilisation de larmes artificielles plus de 3 fois/jour |
II – Symptômes buccaux |
Au moins un des trois critères suivants : |
– sensation quotidienne de bouche sèche depuis plus de 3 mois |
– à l’âge adulte, glandes salivaires enflées de manière répétée ou persistante |
– consommation fréquente de liquides pour avaler les aliments secs |
III – Signes cliniques ophtalmologiques |
Au moins un des deux tests suivants positif : |
– test de Schirmer ≤ 5/5 minutes |
– score de van Bijsterveld ≥ 4 |
IV – Atteintes des glandes salivaires |
Au moins un des trois tests suivants positifs (non existants en pratique au Maroc) : |
– scintigraphie salivaire |
– sialographie parotidienne |
– flux salivaire sans stimulation < 1,5 ml/15 minutes |
V – Histopathologie |
Sialadénite de score > 1 sur biopsie(s) de glandes salivaires accessoires (foyer : > 50 cellules mononucléées agglomérées ; score = nombre de foyers sur 4 mm2 de tissu glandulaire) |
VI – Auto-anticorps |
– anti-Ro (SS-A) |
– anti-La (SS-B) |
Syndrome de Gougerot-Sjögren : quatre des six critères sont présents avec au moins le critère 5 ou 6 |
Critères d’exclusion · Antécédent d’irradiation cervicale • Infection par le VIH ou le VHC • Lymphome préexistant • Sarcoïdose • Réaction du greffon contre l’hôte • Utilisation de médicaments anticholinergiques |
De nouveaux critères proposés en 2012 |
Un groupe de travail international, le SICCA (Sjögren’s International Collaborative Clinical Alliance) a proposer en avril 2012 de nouveaux critères de classification du syndrome de Gougerot-Sjögren. Ces critères ont été approuvés par l’American College of Rheumatology. Le diagnostic de la maladie serait retenu si au moins deux des trois critères suivants sont présents : 1/ positivité des auto-anticorps anti-SSA et/ou anti-SSB ou positivité du facteur rhumatoïde et des autoanticorps anti-nucléaires (dont le titre doit être supérieur à 1/ 320) ; 2/ tests de coloration oculaire (Vert de Lissamine) avec un score supérieur à 3 ; 3/ infiltrat lymphocytaire avec un focus score >1 focus/4 mm2 dans la biopsie des glandes salivaires. |
L’origine auto-immune du SS est confortée par la mise en évidence, à côté d’une hypergammaglobulinémie assez coutumière dans le SGS, des auto-anticorps anti-SSA ou anti-SSB (présents uniquement chez 50 à 80 % des patients). En fait, un tiers des malades n’ont pas d’auto-anticorps, un autre tiers possède les 2 types d’auto-anticorps et le dernier tiers possède seulement les anti-SSA.
L’examen anatomopathologique des glandes salivaires accessoires (29, 30) apporte un soutien précieux en mettant en évidence une infiltration lymphoïde : son importance est évaluée en 4 stades dont, seuls, les 3 et 4 sont retenus pour le diagnostic. Néanmoins, un résultat positif ne signe pas à lui seul la maladie : de faux positifs s’observent au cours du vieillissement des glandes, et, à l’inverse, un véritable SGS peut présenter des glandes salivaires d’aspect normal. La fréquence exacte de ces résultats discordants n’est pas encore bien connue.
4/ Les complications et les risques potentiellement graves du Gougerot - Sjögren
La reconnaissance rapide de la pathologie chez un patient est indispensable de par les risques d’attaques éventuelles de plusieurs organes et les complications. La pathologie est encore malheureusement très largement sous-diagnostiquée au Maroc.
3.1 Les conséquences digestives
Les troubles connexes digestifs en particulier sont souvent sous-estimés (31) alors qu’on constate couramment :
- des aphtes ;
- des atteintes œsophagiennes : dyspepsie, dysphagie, œsophagite atrophique (32) ;
- des atteintes gastriques : atrophie gastrique (33) ;
- voire des cas d’achalasie ou de gastroparésie (34) intestinales (malabsorption) (35, 36, 37)), pancréatiques, hépatiques (38) …
- sans oublier des infections par H. pylori (39).
3.2/ La survenue d’un lymphome
Le danger principal réside dans la survenue d’un lymphome malin non hodgkinien (40), dont le risque, certes relativement faible (<5%), est tout de même de 44 fois supérieures à celui de la population générale (41) Les localisations extranodales exclusives sont fréquentes (au niveau des glandes salivaires, de l’estomac, du nasopharynx, de la peau ou du poumon). Sa venue serait plus élevée en cas de parotidomégalie, d’adénopathies ou d’une splénomégalie au diagnostic. L’apparition d’une cryoglobuline mixte ainsi que la baisse de la fraction C4 du complément, une lymphopénie CD4 et la présence d’anti SSA en sont des facteurs prédictifs.
3.3/ Les risques de la grossesse
Au cours de la grossesse, le passage des auto-anticorps peut être délétère pour le cœur du fœtus, un phénomène sous-estimé au Maroc : un bloc auriculo-ventriculaire in utéro en découlera éventuellement, nécessitant alors d’abord l’emploi de corticoïdes qui traversent la barrière placentaire et, ensuite, en cas d’inefficacité, la mise en place d’un pacemaker à la naissance.
4/ Les solutions thérapeutiques du Syndrome Sec et du Syndrome de Gougerot-Sjögren (SGS) : des acquis mais encore beaucoup à espérer
Des solutions efficaces existent pour réduire ou rendre supportable le syndrome sec. Le traitement du SGS reste par contre symptomatique, aucune thérapeutique ne s’étant à ce jour avérée capable de modifier son évolution (42)].
4.1/ Le traitement de la sécheresse oculaire
La prise en charge de la sécheresse oculaire (43) passe par l’utilisation de substituts lacrymaux, de viscosité variable, allant de simples larmes artificielles à base de chlorure de sodium aux gels de carbomères synthétiques (44) ou à l'acide hyaluronique. Les formes monodoses à usage unique sans conservateurs sont à privilégier de même que les flacons spécifiques qui filtrent les conservateurs. En effet, les conservateurs (au rôle antibactérien) ont la faculté d’aggraver la sécheresse et l’irritation oculaire en dissolvant le film lacrymal. D’autres solutions sont disponibles en cas de kératites sèches qui résistent souvent aux substituts lacrymaux. Il s’agit en particulier de l’occlusion des canaux lacrymaux (45) qui a pour but de préserver ce qui reste de film lacrymal. Elle est effectuée soit par mise en place de bouchons en plastique ou en collagène soit par cautérisation. L’utilisation d’immunosuppresseurs topiques (le collyre à la cyclosporine 0,05%) constitue aussi le plus grand progrès actuel dans le traitement des kératites sèches du SGS (46). On peut enfin limiter l'évaporation des larmes par des lunettes à chambre humide ou par massage des paupières.
4.2/ Le traitement de la sécrétion salivaire
La sécrétion salivaire (47), elle, peut être suppléée par des substituts salivaires (effet transitoire) et stimulée par des mouvements de mastication (prise de chewing-gums sans sucre, en évitant les dentifrices riches en peroxyde qui aggravent la sécheresse), ou encore par divers autres médicaments appelés sécrétagogues dont la bromhexine (Bisolvon®), l’Anétholtrithione (Sulfarlem S25®), la Pilocarpine (Salagen® 5mg) et la ciméveline (Evoxac)
. La pilocarpine est un alcaloïde naturel extrait des feuilles d’un buisson sud-africain (Pilocarpus jaborandi). Son utilisation médicinale remonte à la fin du 19ème siècle lorsqu’un médecin britannique (Hadden WB, 1888) a décrit en premier son effet favorable sur la xérostomie. Elle améliore nettement la situation du malade (48, 49) que ce soit aux niveaux buccaux, oculaires ou vaginaux. La ciméveline (50) est plus efficace sur la sécheresse oculaire avec moins d’effets secondaires cholinergiques que la pilocarpine qui donne dans 40% des cas une hypersudation. Le chlorhydrate de pilocarpine n’est pas disponible au Maroc mais sa préparation magistrale est toutefois possible (20 mg par jour en 4 prises). La Ciméveline, elle, est commercialisée uniquement aux USA et au Japon.
Sont utiles enfin les gels lubrifiants pour la sécheresse vaginale, le sérum physiologique pour des lavages en cas de sécheresse nasale et le Sucralfate pour le traitement des aphtes buccaux.
Par ailleurs, les tuméfactions des glandes salivaires douloureuses bénéficient d’une courte cure de corticoïdes à faible dose.
4.3/ Le traitement spécifique au SGS
D’autres traitements médicamenteux (51, 52) peuvent être utilisés dans le traitement des manifestations extraglandulaires : les manifestations articulaires se traitent en première intention par les antipaludéens de synthèse (Plaquénil*) nécessitant plus rarement le recours à certains immunosuppresseurs comme le Méthotrexate. On peut soulager le phénomène de Raynaud par la prescription d’inhibiteurs calciques. En cas de tuméfaction douloureuse des parotides, une cure courte de corticoïdes peut être efficace.
En cas de complication viscérale grave, on peut recourir à la corticothérapie à forte dose, à des médicaments immunosuppresseurs comme le Cyclophosphamide (Endoxan*) ou l’Azathioprine (Imurel*). Une biothérapie utilisée dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde ou de certains lymphomes (Rituximab, Mabthéra*) peut être proposée dans certaines complications viscérales de la maladie. Ce même médicament fait actuellement l’objet d’essais thérapeutiques dans le syndrome de Gougerot-Sjögren. Ces biothérapies comme les immunosuppresseurs ont comme effets indésirables principaux de favoriser la survenue d’infections qu’il faut prévenir au maximum par la mise à jour des vaccinations
Pour les atteintes rhumatologiques, on dispose des antalgiques simples, d’anti-inflammatoires non stéroïdiens et de la corticothérapie. En cas de polyarthrite, on utilise classiquement les mêmes moyens que pour la polyarthrite rhumatoïde à savoir l’hydroxychloroquine (Plaquenil) et le méthotrexate. Les atteintes cutanées, tel le purpura vasculaire associé à l’hypergammaglobulinémie, répondent bien aussi à l’hydroxychloroquine. La pneumonie interstitielle et la néphropathie interstitielle réagissent bien à la corticothérapie.
Enfin, la biothérapie, utilisée avec succès dans la polyarthrite rhumatoïde et les vascularites nécrosantes, cherche actuellement son chemin dans le traitement du SGS. Les résultats les plus encourageants sont obtenus par le Rituximab (Mabthéra) qui se révèle efficace sur la sécheresse buccale et la fatigue, à condition d’un traitement précoce dans les premières années de la maladie. Des essais ont déjà eu lieu avec l’étanarcept (Enbrel). De grands espoirs sont attendus également des traitements anti-BAFF qui découlent d’ailleurs le plus de la physiopathologie du SGS. Nous nous trouvons actuellement certainement à une période charnière où les biothérapies vont bientôt rapidement apporter un réel soulagement dans la souffrance des personnes atteintes.
Casablanca, le 26/01/2018
Dr MOUSSAYER KHADIJA الدكتورة خديجة موسيار
اختصاصية في الطب الباطني و أمراض الشيخوخة
Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie
Consultante à l’Hôpital International Universitaire Cheikh Khalifa Ben Zayed (Casablanca)
Présidente de l’Alliance Maladies Rares Maroc
رئيسة ائتلاف الأمراض النادرة المغرب
Présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS)
رئيسة الجمعية المغربية لأمراض المناعة الذاتية و والجهازية
Chairwoman of the Moroccan Autoimmune and Systemic Diseases Association
Membre de la Société Marocaine de Médecine Interne (SMMI)
Vice-présidente de l’association marocaine des intolérants et allergiques au gluten (AMIAG)
Secrétaire générale de l'association des médecins internistes du grand Casablanca (AMICA).
Vice-présidente de l'association marocaine de la fièvre méditerranéenne familiale (AMFMF)
ANNEXES
Annexe 1 : les glandes salivaires
La salive est produite à 95 % par trois paires de glandes principales : les parotides produisent la majorité de la salive, à prépondérence séreuse, et lors des repas ; les submandibulaires et sublinguales génèrent la salive séromuqueuse et muqueuse au repos entre les repas ; les 5% restants sont fournis par les glandes salivaires accessoires (~ 1000) réparties dans la cavité buccale et l'oropharynx. Le flux salivaire total sans stimulation est d'environ 0,4 ml/min (800 à 1500 ml/24h). La salive – composée d’eau à 99%, de protéines et de minéraux - assure différentes fonctions de lubrification, d’aide à la mastication, à la déglutition, à l’élocution et au nettoyage des tissus buccaux. Elle initie également le processus de digestion des aliments, protège contre la carie et participe à la reminéralisation des dents.
Annexe 2 : Les glandes lacrymales Les larmes sont produites à une cadence de 0,1 ml par heure, soit un peu moins d'un litre par an. Le film lacrymal (51) a un rôle essentiel pour la cornée en la protégeant et la nourrissant, la cornée n’étant pas vascularisée. Il est constitué de 3 couches :
1/ la couche superficielle huileuse, composée de phospholipides et produite par les glandes de Meibomius : sa principale fonction est de lutter contre l'évaporation des larmes ;
2/ la couche intermédiaire, la plus épaisse, composée de sécrétions aqueuses des glandes de Krause et Wolfring : elle contient une série de substances antimicrobiennes dont le lysozyme, la protéine majeure des larmes, la lactoferrine ainsi que des immunoglobulines ;
3/ la partie interne, une fine couche muqueuse qui dérive des cellules en gobelet de la conjonctive : elle facilite la dispersion des larmes sur la surface oculaire.
Annexe 3 Prudence devant les écrans !
Le travail ou les activités de loisirs devant un écran (ordinateur, tablette ou portable) sollicitent beaucoup les yeux et il est nécessaire de bien veiller à une bonne installation de son poste de travail ainsi qu’au rythme de travail à observer pour éviter la sécheresse oculaire et/ou les maux de tête. On peut mesurer l'ampleur de ce phénomène quand on sait que près de 10 % des adolescents en sont atteints, notamment à cause d’une lecture trop intensive de vidéos sur les téléphones portables.
Ainsi, l’écran d’un ordinateur (ou d’un téléphone portable) doit être perpendiculaire à la fenêtre pour réduire les reflets et les différences de luminosité (et en privilégiant toujours un éclairage modéré dans un espace clos), espacé de 50 à 70 cm des yeux et situé plus bas que la ligne d'horizon de l’œil de sorte à toujours regarder vers le bas. De la sorte, les paupières recouvrent une partie de l’œil, réduisant ainsi l'exposition du globe oculaire à l'air ambiant. Enfin, évitez de lire ou d’écrire sur des fonds sombres et préférez les fonds clairs et une grosse taille de caractère.
Par ailleurs, il est important de préciser que le taux de clignement des yeux chute drastiquement lors du travail ou du loisir devant un écran : sa cadence tombe assez rapidement, et sans même s'en rendre compte (de 3 à 4 fois par minute contre 15 en moyenne normalement), ce qui fragilise davantage la qualité du film lacrymal. Or, chaque clignement permet de redistribuer une nouvelle couche de larme à la surface des yeux et d'éliminer par le fait même la vieille couche. D'où l'importance de prendre le temps de cligner des yeux volontairement et de faire des pauses hors écran régulièrement d’au moins 5 minutes chaque heure ou de 15 minutes au bout de deux heures.
Références :
- Le travail sur écran Que Choisir Santé décembre 2007-N° 12 – P 16
- Jun Hyung Moon, MD; Mee Yon Lee, MD; Nam Ju Moon, MD, PhD -Association Between Video Display Terminal Use and Dry Eye Disease in School Children Journal of Pediatric Ophthalmology and Strabismus March/April 2014 - Volume 51 · Issue 2: 87-92 DOI: 10.3928/01913913-20140128-01 :
Annexe 4 La cytokine BAFF un acteur clé du SGS
L’excès de production d’une cytokine appelée BAFF (B cell Activating Factor) ou encore Blys (B lymphocyt Stimulator) jouerait un rôle important dans sa pathogénie. Elle est secrétée par un très grand nombre de cellules différentes : monocytes, lymphocytes, astrocytes du système nerveux central et aussi cellules épithéliales des glandes salivaires. La cytokine BAFF permet aux lymphocytes auto-réactifs de résister à leur destruction par le système immunitaire. Des biothérapies sont actuellement à l’étude (Belimumab notamment) pour précipiter l’apoptose (la mort) de ces lymphocytes par des anti-corps monoclonaux anti-BAFF. Rappelons que les cytokines, une famille de molécules très prolifique, assurent de façon générale, la communication entre les différents intervenants du système immunitaire.
Annexe 5 L’épigénétique : une nouvelle approche pour cerner la pathogénie auto-immune
Les causes du SGS sont encore mal définies. L’hypothèse la plus probable fait intervenir une infection par un ou plusieurs virus, survenant sur un terrain génétique prédisposant. Actuellement, la recherche génétique ne s’intéresse pas seulement aux mutations qui altèrent l’information contenue dans l’ADN mais à l’épigénétique, c’est à dire aux mécanismes chimiques par lesquels cette information peut ou non s’exprimer : un même gène pourra être lu différemment selon les circonstances et l’environnement de chaque individu (mode de vie, nutrition, présence de tel ou tel virus). Une perturbation quelconque peut donc empêcher, modifier ou hyperstimuler cette expression. Une des réactions étudiées en particulier est celle de la méthylation de l’ADN, qui interviendrait dans la pathogénie des maladies auto-immunes. En France, une équipe de l’INSERM dirigée par le professeur Corinne Miceli-Richard étudie, sur des cellules de malades et d’individus sains, un gène, dénommé IRF5 qui possède un morceau de sa séquence variable régulée par cette méthylation : on sait en effet que la variation de sa composition donne un risque plus élevé de contracter le SGS.
ABSTRACT
The two main symptoms of Dry Syndrome are Dry eye (keratoconjuctivitis sicca) and. Dry mouth (xerostomia)
Sjögren’s Syndrome is a chronic, inflammatory, multi-system, auto-immune disorder that is progressive, with a dry syndrome. This means those who have Sjögren’s have it for the rest of their lives and it may affect many parts of their bodies. Sjögren’s predominately affects woman (90 % of people with Sjögrens are women, 10 % men )
The Moroccan Autoimmune and Systemic Diseases Association is a health association dedicated to bringing a national focus to autoimmunity and the eradication of autoimmune diseases and the alleviation of suffering and the socioeconomic impact of them. The chairwoman of the association is Khadija Moussayer, MD PHD.
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Références bibliographiques
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ARTICLES MEDICAUX DE L’AUTEUR SUR LES MALADIES AUTO-IMMUNES
- Moussayer Khadija - Maladies auto-immunes : Quand le corps s’attaque à lui-même – Doctinews N° 36 Août/Septembre 2011.
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- Moussayer Khadija - Biothérapies : La révolution des traitements ciblés issus du vivant – Doctinews N° 58 Septembre 2013.
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- Moussayer Khadija - Syndrome sec et Gougerot-Sjögren : Entre un mal fréquent et une maladie au coeur de l’auto-immunité – Doctinews N° 45 Juin 2012
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- Moussayer Khadija - La barrière intestinale et ses pathologies : Du microbiote au leaky gut syndrome - Doctinews N° 69 Août / Septembre 2014
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- Moussayer khadija - L’HYPERTENSION ARTERIELLE SECONDAIRE : ON PEUT EN GUÉRIR ! Doctinews N° 21 Avril 2010
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- Moussayer Khadija مرض أو متلازمة شوغرين مرض يتميز بجفاف الفم و العيون و يصيب النساء بدرجة أول / Gougerot Sjogrën Oujdacity 29/11/2016 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
- Moussayer Khadija الذئبية الحمراء مرض يصيب النساء و لا يزال فتاكا – Lupus Oujdacity 21/12/2016/ [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]